LA CULTURE AIDE À GUÉRIR

Mars 2023

Pendant cinq ans, des patients suivis par les antennes locales de l’hôpital des Murets se sont retrouvés régulièrement à la médiathèque pour la réalisation d’un journal.

« C’est exceptionnel de pouvoir accéder à ce lieu que je ne connaissais pas. Ces ateliers m’ont fait un peu oublier la maladie. Mais ils m’ont aussi permis de m’épanouir dans l’écriture et de me mettre dans la peau d’un journaliste comme mon père qui travaillait au journal Libération. » Ils sont une dizaine comme Vladimir à avoir participé à un atelier journal qui a eu lieu tous les jeudis matins, à la médiathèque entre 2018 et 2022. Le projet a pu se concrétiser grâce à une convention établie entre l’hôpital des Murets de La Queue-en-Brie à travers ses antennes locales : le Centre d’accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP) et l’hôpital de jour, et la médiathèque. L’objectif de ce partenariat était de permettre aux patients suivis pour des troubles psychiques d’accéder à la culture.

Depuis de nombreuses années, la question culturelle est au cœur des préoccupations des équipes soignantes des Murets et n'a cessé de se développer à travers de nombreuses initiatives culturelles et sportives en intrahospitalier comme en extrahospitalier (atelier d'écriture, théâtre, photographie, randonnées, expositions d'œuvres de patients, visite des musées etc.). Pour les encadrantes, la médiathèque s’est imposée comme une évidence. Meryl Sportiche, ergothérapeute et l’une des référentes du projet : « C’était important pour nous, soignants, que les patients aient accès au cœur culturel de la ville. Beaucoup ne connaissaient pas le lieu ou ne le fréquentaient plus depuis le début de leur maladie. Pendant la durée de la convention, ils y sont allés pour l’atelier journal mais aujourd’hui ils le fréquentent aussi sur leur temps personnel et discuter avec les agents qu’ils ont appris à connaitre au fil du temps. »

Cette initiative a abouti à la réalisation de quatre journaux (dont le dernier est un numéro spécial sur la médiathèque Louis-Aragon) entièrement rédigés et illustrés par le groupe assisté d’un médiateur numérique et d’une médiathécaire. Le nom du magazine, La Balise Argos, c’est Fabrice qui l’a trouvé : « Parce que ce projet a été une sorte de bouée de secours pour mes camarades et moi. Ce fut un véritable travail d’équipe. On s’est soutenu pendant tout le processus d’élaboration des articles, des photos, des dessins... » Béatrice a été particulièrement active quand sa maladie le permettait : « j’ai eu beaucoup de plaisir à participer au journal même si pour le dernier numéro je n’ai pas pu m’investir autant que je l’aurais souhaité. » Ils le disent tous, ils sont fiers d’avoir été jusqu’au bout. « Les personnes en soin vivent chez eux, avec parfois des allers retours à l’hôpital. La maladie a pour conséquence un ralentissement de la vie, une difficulté à s’investir dans la relation à l’autre, à participer à des activités dans la durée, poursuit Mme Sportiche. Ces rendez-vous étaient une proposition qui leur a été faite de participer à un projet collectif à hauteur de la possibilité de chacun. Cela a levé la pression. » Une autre intervenante du CATTP confirme : « Beaucoup sont atteints de troubles psychiques. Ils peuvent se désociabiliser, perdre contact avec la réalité. Leur offrir la possibilité de pratiquer des activités, leur permet de reprendre pied et s’ouvrir aux autres. Grâce à ces ateliers, ils ont pu extérioriser leurs émotions, avoir une parole libre. Le groupe oblige aussi chacun à trouver sa place. La réalisation de ce journal, la découverte de l’équipement culturel et des personnes qui y travaillent est aussi un plus pour eux. Cela les a aidés à gérer leur anxiété, le tract, à prendre confiance en eux-mêmes et à aller de l’avant. »