À JAMAIS LES PREMIERES

Février 2021

À Fontenay-sous-bois, 2021 démarre sportivement comme 2020 s’est achevé : en trombe, en apothéose, en pic ! en cap ! en péninsule ! avec un titre de champion d’Europe. Après Massi Tachour, qui nous a ravis en décembre dernier en s’adjugeant la ceinture de l’Union européenne chez les super légers (boxe anglaise), c’est au tour d’Aurélie Monvoisin et de Gwendoline Daudet de nous déconfiner le moral en régalant la ville d’un titre taille continentale dans la discipline du patinage de vitesse sur piste courte (short-track). Le 24 janvier, avec leurs coéquipières Tifany Huot-Marchand et Aurélie Lévêque, les deux USFontenaysiennes ont fait fondre la glace de Gdansk-Pologne pour aller chercher le titre de championnes d’Europe élite du relais 3000m féminin ! Une grande première pour la France ! Dans ces cas-là, on écrit : historique. Avec un ADN constitué à 50% de gènes fontenaysiens, cet événement fait l’honneur de la ville.  On est #fiers ! Interviews croisées de nos championnes en or…

Gwendoline, tu es en licence d’histoire. C’est plus facile de se rappeler les dates marquantes quand on les rend soi-même historiques ? 

Gwendoline Daudet. Le 24 janvier 2021 est une date qui restera gravée dans ma mémoire. C’est la première fois qu’un relais tricolore remporte un titre majeur dans notre discipline. C’est quelque chose. C’est plein d’émotions. C’est compliqué de mettre des mots dessus. J’y ai mis beaucoup de larmes sur le podium ! C’est d’autant plus beau que c’est une victoire d’équipe. C’est une joie indicible qu’on partage avec Aurélie, les filles, et toute l’équipe de France ! Ce titre, la Marseillaise, le tweet de félicitations de notre ministre des sports, Roxana Maracineanu, c’est une immense fierté, surtout que nous l’emportons lors de la journée internationale du sport féminin ! J’ai beaucoup pensé à ma tante, Sandrine Daudet, décédée il y a un an, qui fut multiple championne de France et médaillée de bronze en relais aux championnats du monde. J’espère l’avoir rendue fière... J’ai aussi beaucoup repensé aux mercredis raviolis avant de filer à l’entrainement à la patinoire Allende quand j’étais petite…

Vous êtes championnes d’Europe, mais vous étiez loin de partir favorites…

Aurélie Monvoisin. Je revenais de blessure, alors ce titre a une saveur toute particulière pour moi. Il me rappelle que tout est possible. En septembre, on m’a diagnostiqué une fracture de fatigue au niveau des vertèbres lombaires. Je n’avais recommencé à patiner qu’à la fin du mois de décembre. De plus, l’un des piliers de l’équipe, Véronique Pierron, a raccroché en début de saison. Avec quatre participations aux Jeux, c’était la patineuse la plus expérimentée de notre groupe. On est arrivées à Gdansk plutôt dans l’idée de construire, d’acquérir de l’expérience, de préparer la saison prochaine, sachant qu’après dix mois à l’arrêt à cause de la crise sanitaire, nous n’avions quasiment aucun repère. Notre principal objectif était de se faire plaisir, de prendre nos marques. On visait le top 5, la victoire dans la finale B… et on remporte la finale A ! On a su être présentes, tenir debout, faire un sans-faute. Les italiennes, les hollandaises ont chuté, et le relais russe, qui termine juste devant nous est disqualifié. On est passées entre les gouttes ! Ce genre de course fait toute la beauté de notre sport ! Tout peut arriver en short-track ! On a su montrer du caractère. Ça a été une folie au moment du sacre. C’était tellement beau, nos émotions venaient de tellement loin. On a vécu un moment magique, de communion avec tout le staff. Après toutes ces années, ces sacrifices, et même le confinement, c’est juste incroyable ! Quand on se donne les moyens, quand on passe au-dessus de la fatigue, de la douleur, des doutes, des peurs, quand on ne lâche rien, on peut réaliser des choses extraordinaires ! On mesure le chemin parcouru ensemble, avec Gwendo, depuis notre enfance… C’est notre première médaille ensemble et elle est historique ! On est très fières pour notre club, l’USF.

Pensez-vous que ce titre va vous faire passer un cap, alors que nous sommes tout juste à un an des Jeux d’hiver de Pékin ? 

A.M. Ce titre va nous donner un peu d’assurance. Cette victoire nous montre qu’on est capables de faire quelque chose, que nous ne sommes pas là par hasard. On avait besoin de ça même si nous affichons une certaine régularité en termes de performance avec le relais féminin (Aurélie compte trois médailles de bronze en Coupe du monde avec le relais féminin ; Gwendoline avait décroché une médaille de bronze aux championnats d’Europe en 2019 avec ce dernier). Mais là, on touche l’or dans une grande compétition internationale. C’est peut-être un déclic. C’est en tout cas bon pour la confiance. Mais sur la glace, il vaut mieux ne pas s’enflammer, garder la tête froide. On va descendre tranquillement de notre petit nuage et nous reconcentrer pour tout donner aux mondiaux qui doivent se disputer du 5 au 7 mars en Hollande…

G.D. Ce résultat est prometteur, surtout que l’équipe est jeune. Ça nous motive encore plus pour la suite. Mais on ne veut pas se mettre la pression. Ce titre, on le remporte alors que c’est notre première compétition dans cette configuration et qu’on était outsiders total ! Nous prenons du vécu, nous progressons, il faut continuer. J’ai d’ailleurs participé à mes premiers championnats d’Europe en individuel et je concoure dans la finale B du 1500m lors de laquelle une concurrente me fait chuter. On a hâte d’être à l’année prochaine c’est sûr, mais d’ici-là, on savoure, sachant qu’on va vite se remobiliser pour préparer les championnats du monde. On risque d’être plus attendues… On espère aussi que ce titre va faire passer un cap médiatique à notre sport. Le short-track, en France, reste une discipline de l’ombre, confidentielle. C’est dommage car c’est un beau sport, très nerveux, où ça va vite et où il y a plein de rebondissements. Et même des titres de championnes d’Europe pour la France !  

Le vaccin de la victoire

Le titre de championnes d’Europe décroché par deux enfants de l’USF fait office de vaccin contre la sinistrose au sein du club omnisport, particulièrement au sein de sa section TGV on ice. « Nous sommes très fiers et très heureux, confie ainsi Cécile Lekhal, sa Présidente. Voir le sourire, la joie sur les visages d’Aurélie et de Gwendoline, après cette victoire historique, ce n’est que du bonheur. Je les ai vues toutes deux faire leurs premiers pas sur la glace d’Allende, Aurélie avait sept ans, Gwendo neuf ans… Elles sont un exemple pour nos jeunes. » Alexis Sodogas, qui fut leur entraineur et qui officie aujourd’hui à la Fédération française des spots de glace, les revoit aussi en mode madeleine de Proust : « Aurélie a toujours aimé la course, elle a toujours eu ce mental de battante. Gwendoline, j’ai le souvenir d’une petite fille émotive mais passionnée. Elle a beaucoup progressé techniquement ces derniers mois et elle arrive aujourd’hui à mieux contenir ses émotions. Sauf sur les podiums! Et là, j’avoue, c’est à moi que ça donne du mal pour canaliser les miennes… Bravo les filles. » Cœur avec les doits.