DETOURS DE PISTE

Juin 2023

Co-fondatrice du cirque Médini, Josiane Médini n’est pas née enfante de la balle, mais a fait de la piste aux étoiles sa voie lactée dans laquelle gravitent également le théâtre et l’écriture. 

Dans ses yeux, sur sa peau, sous ses ongles et jusque dans les souvenirs qui ensemencent son salon, Josiane Médini à l’âme circassienne. À 74 ans, co-fondatrice du cirque éponyme et de son école, elle a façonné plusieurs générations d’artistes. Autrefois, avec Italo son grand amour, Mozart du jonglage disparu en 2015. Maintenant, entourée d’une équipe jeune et dévouée qu’elle dirige en matriarche, avec tendresse et caractère. Ces élèves pourraient être ses petits-enfants. Très peu manquent de faire le détour par la villa du Chatelet pour s'enquérir de sa santé depuis son opération récente à la hanche. «   Mon médecin m’a conseillé de marcher alors je me rends à pied avec ma canne, jusqu’au chapiteau   », confie cette fière habitante de Fontenay depuis toujours. Retirée des projecteurs, elle se consacre à l’enseignement. «   J’adore m’imposer dans le travail quotidien mais je déteste m’exposer.  »

CONTORSIONNISTE

Entre 22 et 50 ans, celle qui n’était pas une enfante de la balle l’est devenue, adoubée par Italo avant d’être adoptée par la planète saltimbanque. Terminé son travail dans les bureaux. Le duo a enchanté les scènes du monde entier. Lui, dans son numéro virtuose à rendre fou un psychomotricien. Elle, dans celui d’une poupée contorsionniste, s’extirpant d’une boîte de 42 cm de côté. «   J’ai été initiée par un Yogi qui avait remarqué ma souplesse malgré de gros os   », dit-elle en riant. Les cirques Bouglione et Jean Richard, l’Olympia, le Casino de Paris et Line Renaud… leur ont déroulé le tapis rouge. Sans compter les tournées en Afrique du sud, en Israël, au Japon.

Mais avant même de débuter dans la carrière Josiane touchait les étoiles. «   Le cirque est entré chez moi à l’âge de 6 ans grâce à une petite voisine rue Bassée. Elle était d’une famille circassienne à une époque où beaucoup s’installaient à Fontenay parce qu’on y trouvait de grands espaces pour répéter.   » Il y avait aussi le théâtre, autre passion de Josiane dès l’école Jules-Ferry. «   J’ai découvert les mots, la poésie, j’ai gagné à 10 ans un prix de rédaction et fait mon premier spectacle à 12.   » Elle a fertilisé son sillon dramatique dans une troupe précurseur de l’école de théâtre de Fontenay. Cependant, le monde du cirque restera à jamais sa voie lactée. «   J’aime par-dessus tout cet univers où la hiérarchie est horizontale et où on partage les galères.   »

TROIS ROMANS

Les tournées effrénées d’une ville par jour, la vie en caravane, les planches du music-hall, ont rythmé trois décennies. «   Avec Italo on a voulu ralentir alors, encouragés par la municipalité nous avons fondé en 1994 cette école de cirque pour transmettre notre savoir au grand public et former la relève.  » Infatigable, Josiane a aussi créé la troupe «   Les clownasses   » avec qui elle prépare une comédie musicale en hommage à Pierre Bergam, enseignant-maître es trapèze décédé à 102 ans. Et comme si elle risquait de s’ennuyer, cette dévoreuse de polars a publié trois romans en neuf ans. «   J’aime la mélodie des mots, écrire sur les relations entre les individus et sur les injustices à réparer  », confie-t-elle. Sa facilité est déconcertante : «   J’ai tout le texte dans ma tête comme un griot, et ensuite l’écriture arrive automatiquement.   » Et on ne vous mentionne pas sa participation à la chorale de l’église Saint-Germain. Ce sera pour un autre tour de piste.

Josiane Médini, Nouvelles, éditions La Bruyère. 20 euros.