
PAS QUE DE L’EAU DANS LES BOUTEILLES
Traitements illégaux, fraudes massives… Les industriels minéraliers sont à nouveau mis en cause.
C’est l’antienne de l’eau la plus ou moins saine : eau courante ou en bouteille ? Il semblerait bien que cela ne fasse plus grand débat, au vu des dernières révélations sur la pollution de l’eau en bouteille. Une enquête conjointe du Monde et de la Cellule investigation de Radio France, publiée le 30 janvier 2024, a mis au jour les traitements illégaux pratiqués par de nombreux minéraliers pour masquer les contaminations de leurs eaux. De nombreux industriels, et pas des moindres, ont eu recours à ces tromperies : entre autres le groupe Sources Alma (Cristaline, Saint-Yorre, Vichy-Célestins…) et Nestlé Waters (Vittel, Contrex, Hépar, Perrier, San Pellegrino…).
Un rapport des Agences Régionales de Santé (ARS), établi avec le concours de l’Inspection générale des affaires sociales et de la santé (IGAS), a pointé des traitements non conformes pour « 30 % des désignations commerciales » et « de graves écarts à la réglementation » concernant le groupe Nestlé : « microfiltration en deçà de 0,8 micron, mais aussi charbon actif et ultraviolet dont l’interdiction est absolue ». Dans un podcast de Radio France[1], Marie Dupin, journaliste à l’origine de l’enquête, a rappelé qu’« en France, ce sont les Agences régionales de santé qui contrôlent la qualité des eaux bouteilles ». Elle a ensuite expliqué que « les agents ne pouvaient rien voir car Nestlé avait caché les traitements interdits derrière notamment des armoires électriques ». Tout aussi inquiétant sur la probité des pouvoirs publics en la matière, l’enquête révèle que le cabinet de la Première ministre d’alors, Élisabeth Borne, avait accordé à Nestlé « la possibilité d’autoriser par modification des arrêtés préfectoraux la pratique de la microfiltration inférieure à 0,8 micron ».
La mise en cause des eaux de source et des eaux minérales naturelles en bouteille n’est pas nouvelle. Comme le rappelle l’UFC Que-Choisir dans l’article Eau en bouteille, tromperie à grande échelle pour masquer les contaminations, publié le 31 janvier 2024 : « Une étude américaine, publiée dans la revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences, le 8 janvier dernier, écornait déjà ce storytelling [d’une eau plus pure et plus saine] en décomptant près de 24000 fragments de micro et nanoplastiques par litre, pour différentes marques d’eau en bouteille. »
[1] « Plusieurs producteurs d’eau en bouteille ont filtré illégalement leur eau pour masquer une contamination », Radio France, 30 janvier 2024.