RESPIRER SANS ÉTERNUER

Mai 2025

Depuis des années, la ville s’emploie à limiter l’exposition des personnes allergiques aux pollens, en évitant de planter certaines espèces d’arbres et de végétaux ou en limitant leur concentration dans les lieux publics.

Congestion nasale, éternuements à répétition, conjonctivite, difficultés à respirer… Romane cumule plusieurs de ces symptômes, et elle en connaît la cause. Les allergies aux pollens battent leur plein et, jusqu’au seuil de l’été, la jeune femme devra anticiper chacun de ses déplacements. « J’emporte toujours avec moi un guide de botanique pour reconnaître les arbres ou les plantes à fuir », explique cette pet Sitter. Pas de chance : son métier l’amène justement à promener les chiens dans le bois de Vincennes.

Comme cette trentenaire, 20 % des enfants à partir de 9 ans et 30 % des adultes présentent des allergies dues à la floraison des arbres, des graminées et d’autres plantes. Le bouleau, le charme, l'aulne, le noisetier, le chêne, le châtaignier, le platane et le frêne comptent parmi les plus allergisants lorsqu’ils disséminent leur pollen dans l’air. Houlque laineuse, fromental bulbeux, dactyle aggloméré, ray-grass anglais… sont des équivalents chez les graminées. L’armoise et l’ambroisie se distinguent également. Avec le réchauffement climatique, la période des allergies aux pollens commence plus tôt et se prolonge. La pollution de l’air aggrave également les symptômes. Une alimentation insuffisamment diversifiée, riche en produits transformés, en sucres et en graisses saturées favorise aussi les réactions aux pollens.

CHOISIR LES ESSENCES

Là où de nombreuses collectivités continuent de privilégier certaines de ces espèces pour leurs qualités esthétiques et leur résistance, Fontenay a pris le contre-pied. Depuis une vingtaine d’années, la commune veille à ne pas installer n’importe quoi, n’importe où, et en n’importe quelle quantité. « Notre politique consiste à éviter de planter ces types de végétaux à proximité de lieux accueillant du public, tels que les écoles », confirme Mélanie Roger, responsable des Jardins et de la Biodiversité. « Nous ne nous interdisons cependant pas d’introduire des noisetiers, par exemple, car ils libèrent leur pollen en hiver au moment où les fenêtres sont fermées », précise-t-elle. En 2027, le groupe scolaire Romain-Rolland disposera d’une cour végétalisée plantée d’essences choisies pour être non allergènes. Idem à la maternelle Mot, avec un noyer, un arbre de Judée, un micocoulier et un phellodendron. Autre mesure, la proximité d’un sous-bois permettant d’agrandir le terrain de jeu, un débroussaillage s’impose pour limiter les risques, et le talus est engazonné.

PRÉSERVER LA BIODIVERSITÉ

La concentration d’espèces allergènes en un même endroit est bannie : exit les alignements d’arbres mono-spécifiques. Il n’est cependant pas question de sabrer dans le patrimoine arboré où on retrouve des noisetiers, des chênes, des cyprès…présents avant la prise en compte des allergies. C’est pourtant ce que demandent régulièrement des riverains. Mais imaginerait-on abattre les érables dans le parc de l’Hôtel-de-Ville ? Dans une ville très engagée dans la préservation de la biodiversité, il faut savoir gérer les contradictions. « On ne va pas se remettre à tondre les prairies sous prétexte qu’y poussent des graminées allergènes, car celles-ci accueillent les insectes et nourrissent les oiseaux », rappelle Mme Roger. Et que serait un jardin gourmand sans un noisetier ? Par ailleurs, introduire — à dose homéopathique — des arbres allergènes permet non seulement de diversifier les essences, mais aussi d’entraîner et de renforcer le système immunitaire, et notamment des enfants. Un mal pour un bien !